- Les bars débordent de rires et de mots outranciers, de filles et de
bonnets.
Parfois la bagarre est dans la rue.
- C’est là que notre homme a trouvé sa
fin, légitime certes, mais inavouable : il venait de voler. Voler une
princesse à son homme ! Et la princesse, c’était toi, aussi !
Tu t’aventurais souvent dans ce quartier à
la recherche de l’aventure d’un soir, d’une nuit. Et tu l’as trouvée !
Avec l’homme de ta vie …
Lui, avait été quelques mois auparavant
soldat dans l’armée de terre. Avant de rejoindre son groupe, il avait décidé de
parcourir le monde dans l’attente de découvertes majeures. Et en effet, il fit
ta rencontre.
A l’époque, tu étais comme beaucoup de jeunes, fraiche, et frêle. Tu arpentais déjà les trottoirs de Manille et vivais toi et tes sœurs de l’obole des marins de passage. Rien ne t’y obligeait, pourtant tu avais pris goût à la chose. Tu fus remarquée par un des mafieux qui sévissait dans le coin. Très rapidement, tu fus sa chose plus que son épouse. Cette situation – courante – ne t’inquiétait guère jusqu’à ce que tu rencontres le VRAI amour, celui de toute une vie voire plus.
Ce « lui » venait de débarquer
dans la ville peu avant d’en repartir, menottes aux poignets. En effet, la
coutume visant les étrangers en situation irrégulière l’avait dénoncé aux
autorités et enfermé très vite dans une geôle étroite et sentant le moisi. Il y
resta quelques jours, le temps pour lui de s’habituer à son nouveau mode de
vie. Puis il fut transféré dans une autre ville, une autre prison. Là, il y
croupit quelques mois, avant de rentrer, épuisé et meurtri par l’abandon des
siens qui n’avaient rien fait pour l’aider.
Pendant ce temps, l’héroïne se morfondait,
tout comme la belle qui l’attendait dans son pays, au Royaume-Uni.
Le temps a passé …
L’amour aussi.
Les désirs se sont émoussés dans l’attente
d’un retour rapide.
Lorsqu’il put enfin revenir au pays, un
baluchon à l’épaule, il fut presque mis à porte de chez lui pour n’avoir donné
des nouvelles en temps et en heure. Cette infortune ne dura point puisqu’il
rencontra Barbara, qui alors chantait déjà.
Cette dernière, attendrie par les
multiples épreuves, ne résista point aux enlacements et autres approches. Ils
formèrent un couple délicieux faisant rejaillir sur leur entourage l’ardeur de leur amour.
Changement de vie, « lui » décida de repartir au bout du monde afin
de dénouer son affaire philippine. Il y arriva plus tôt que prévu et se
présenta aux autorités afin de légaliser ses papiers. Celles-ci ne
l’entendaient pas de la même oreille. On lui mit à nouveau les menottes …
La suite appartient aux impondérables de
l’administration – comme de toutes les administrations d’ailleurs. Il fut pris
dans l’étau de la torture, fréquente dans ce pays. Il n’y survécu point.
Voilà l’histoire de l’homme qui vécut
plusieurs amours, plusieurs vies d’amour pour enfin succomber à l’ambition
d’être.
- Les arbres dans tout ça ?
- Les arbres ? Eh bien, ils toujours
là. Ils magnifient la candeur qui caractérise les simples d’esprit, les heureux
d’âme. Ils témoignent de la longévité de leur nature intrinsèque mais aussi de
la stupidité humaine/humanoïde dans les univers féconds de l’imagination.
Ils rassemblent à eux quatre les atouts de
la vieillesse et de la jeunesse en restant immobiles aux tracas du monde. Et ce
faisant, ils jouissent d’une tranquillité absolue et totale au départ de
laquelle il fait bon de rester quelques instants chaque jour.
- Pas seulement, ces arbres-âme recèlent en leur forme et leur stature des
histoires sans pareilles.
Lorsque je me suis arrêtée, je les ai observés, ils m’ont fait partager
leurs sinueux tourments d’antan … et je me suis retrouvée en eux, dans
l’enlacement de leur branchage, leurs plaies ouvertes
aux nids d’oiseaux ou d’écureuil,
leurs soubresauts.
- En effet, ce fut difficile pour nous
quatre ou cinq puis le cinquième n’est pas présent, d’entendre la nouvelle du
départ de l’un de nous, le plus « dévergondé », toi en
l’occurrence ! Un départ qui ressemblait à un adieu et non à un au-revoir.
Tu fus déportée alors dans un autre pays, un qui ne t’appartenait pas. Il t’a
fallu du courage et de l’abnégation car ta situation était plutôt rocambolesque
…. A tel point qu’il t’a fallu jouer de prudence quand ils t’ont pris, comme en
42 près du poste frontière.
Il te manquait juste un petit passeport
révélant ton identité de frauduleuse !
- Quelque chose qui a laissé des traces …
et surtout pour qui ?
- Bien-sûr que c’est pour toi, pour nous
(ensemble des énergies qui te composent) ; mais aussi pour ceux qui
passent et repassent promenant leur toutou à la main.
- Pour moi au moins qui dévoile ici mon émotion profonde. Sans pleurs ni
reproches. Juste comme prise dans un processus, un tourbillon. Un mouvement de
ma base, une réaction au bout d’un chemin.
- Du chemin de l’âme et de nous avec elle. Nous, c’est הוהי à
gauche en arrière, toi catha, tu es à gauche devant (sur la photo),
moi à ta droite et en arrière de moi, c'est אלהים .
Il s'en est suivi un joyeux festin où tous
étaient comme ivres. Un festin fait de détritus et de fruits sauvages récoltés
au niveau de la canopée. Car nous étions nés oiseaux et non mammifères comme
aujourd'hui.
- Au bout des troncs qui se tordent ou s’érigent dans l’ambition non
défunte de toucher la voute céleste.
Et tout d’un coup …
- tout d’un coup, tu m’enchantes. De tes
longs poils hérissés, tu geins à n’en plus finir. Tu vis la disgrâce de ton
amoureux. Puis tu es palmipède. Hors de l’eau, tu te trouves. Palmipède encore
mais dans une situation difficile : tu ne retrouves pas tes petits nés il
y a peu. Ta chanson est celle d’un alléluia majeur pour la tristesse et le
besoin de réconfort.
Il y a tant de formes que tu as prises à
mes « yeux » que je ne saurai les compter ! Tu as programmé
celle d’aujourd’hui, bien ...
- Tout d’un coup, le brasero est passé par
là
A nettoyer, à lâcher les dernières
effluves ...
nauséabondes.
La place est libre pour les douces
senteurs d’un chaud automne. Et c’est l’allégresse qui régale, c’est la danse
aux feuillages conquis, de déhanchements en arabesques, les arbres s’étirent au
son des
- tambourins.
Les années, les
décennies et certainement plus, sont là dans les rides des arbres du passage
Giacometti à Montpellier, alors petit bourg de province connu par son école
fameuse de médecine. Et peut-être les beaux-arts.
Aux sons des tambourins. Les torsions sont des appas aux vents du sud,
tournoiements excessifs s’enrubannant autour d’un sol fiévreux il n’y a pas si
longtemps …
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